Un voyage sans retour???
Partir en voyage. Puis revenir, ou en
revenir. On pense souvent à une grosse tablée de copains, en parlant des
dernières nouvelles de France et des anecdotes de voyage. Après des mois de
pérégrination, de rencontres fabuleuses, de moments de galères, de paysages
hallucinants… Le retour, c’est comment ? Pas toujours évident…Impressions.
Un mot d'excuse pour ce retard énorme.
Nous vous avions promis un article final, pour clôturer ce blog, qui a été un
lien fort avec vous pendant ce voyage. Qu'il a été dur à enfanter cet article!
Vidian s'est laissé du temps, et un peu de recul pour regarder plus
attentivement tous les messages griffonnés sur le mur immense que représente
notre voyage. Il a laissé ses pensées éclabousser son ordinateur, puis à
ramasser petit à petit ces idées pour vous écrire ce dernier post d'Instinct
Nomade. En espérant qu'il vous plaira...bonne lecture!
ATTENTION! De nouvelles vidéos sont en ligne!
Lyon, le point de départ de notre retour
On en était resté là. Le moral au top.
Comme dans un rêve, le programme se gère de minutes en minutes, parfois sans
cohérence. En mai, fait ce qu’il te plait. C’est parfait ! Nous n’allons
pas vous détailler toutes nos retrouvailles, sachez simplement qu’elles furent
de purs moments de bonheur !! Revenir sublime même notre pays. Les lieux
connus se laissent découvrir sous un nouveau regard. Dieu que la France est
belle! En stop, en voiture, en bus ou en train, on explore alors un nouvel
espace. Armelle s’étonne de la régularité de la route, sa propreté, sa qualité,
le respect de ses règles. Les paysages sont superbes. Les improbables
rencontres géniales. Le voyage continue, en réalité. Ce moment est important.
Il joue le rôle de transition, entre les instants très forts du voyage et le
retour à la vie quotidienne. Ah oui, nous recevons aussi nos paquets, envoyé depuis l'Inde ou la Turquie. Rien de voler, un grand succès!!
Mais voilà que l’on commence à savoir que
l’on est rentré, et nos partenaires (financiers) aussi !
Instinct Nomade à la Mairie de Paris.
Juin 2008. Un verre de champagne à la
main, notre stand fièrement décoré derrière nous, nous « tchatchons »
avec d’autres voyageurs. Nous sommes dans le cadre somptueux des salons de la
mairie de Paris pour la remise des bourses Paris Jeunes Aventure (PJA)
2008-2009. Ambiance champagne et petits fours. Des rappeurs dansent sur une
scène. Nous sommes invités comme les « anciens ». Pourtant, nos
souvenirs de notre périple sont bien frais (c’est peu dire !). Une goncha
ladakhi, une coiffe en fourrure de Mongolie, un drapeau à prières tibétains et
quelques photographies s'accrochent à notre espace, sans oublier la carte du monde
et notre trajet. Une belle boucle. Les « nouveaux » viennent nous
poser mille questions, et cela nous rappelle facilement notre mélange de joie
et d’excitation de l’an passé, dans ce même lieu.
C’est génial. Des stands d'anciens lauréats sont magnifiques. Surtout celui d'une jeune photographe, dont le projet s'était concentré sur une ethnie oubliée d'Afrique. Des images en noir et blanc, belles et pures, chargées d'émotions. Un nouveau lauréat présente aussi son idée de troupe de montage vidéo, à destination des enfants, le tout se trimballant en France durant l'été dans un vieux bus jaune...une idée rigolote, des Bretons marrants!
Dualité de nos réactions.
Au cours de l’été, certaines distorsions
apparaissent entre nous. Dans la manière d’appréhender le retour et le
quotidien, mais aussi à travers nos pensées vers le futur.
Armelle, toujours ancrée dans le réel, contrairement à Vidian, souvent dans ses rêves, tient à chercher du boulot rapidement. « J’ai fait des études d’ingénieur en bâtiment, je vais donc chercher dans ce domaine ». Mais le voyage lui a appris que le contact avec les gens la passionne. Qu’être noyée dans la masse d’un groupe puissant en bâtiment ne la tente pas du tout. Qu’elle aime l’indépendance, et un cadre de travail simple et sympa. Elle dépose délicatement son CV sur le net, et choisit avec soin les entretiens qu'on lui propose rapidement.
Le voyage n’a fait que renforcer les orientations de Vidian, qui cherche à dégotter un boulot-passion. Oui, mais ce n’est pas facile, car il aimerait autant être ébéniste qu’écrivain-voyageur, couvreur que chef de projet au sein d’un parc naturel régional, créer des séminaires d’entreprise que partir comme guide en Finlande retrouver les chiens… Au fait, il n’a pas fait des études en aménagement du territoire ? Si, si, vous avez raison. Alors il prend son temps pour réfléchir, ce que ne peut pas tout à fait comprendre Armelle, qui passe déjà des entretiens d’embauche.
Pendant cette
période estivale, Vidian manque malheureusement un peu à son devoir de mari,
celui d'apporter un peu de sécurité à son couple, en trouvant un boulot par
exemple. Ou en rassurant sa belle par des propos réconfortant. Mais il ne le
réalise pas encore, et finalement a un peu peur de l'avenir. Il répète ainsi sa
phrase fétiche: « on verra », ce qui a le don d'énerver Armelle, avec
qui les différences de point de vue se révèlent conflictuelles. Certaines fêtes
avec les copains ne se termineront pas toujours dans un grand sourire, et les
vapeurs lourdes de l'alcool aidant parfois, on arrivera même à se fâcher. Mais
quand ils se brouillent ces deux là, il n'y a jamais un mot plus haut que
l'autre. La raison est simple, ils ne se parlent alors quasiment plus!! Nous
alternons alors les moments de joie intense et les prises de becs silencieuses,
finalement pas bien graves !
Raconter son voyage
Certaines retrouvailles tournent un peu plus court. On
pourrait écrire sur l’art des gens à poser des questions désespérantes! En
effet, un phénomène étrange peut survenir lorsque l’on raconte ses péripéties.
Pour schématiser, classons les gens en deux catégories.
Ceux qui s’intéressent vraiment au voyage.
Et ceux à la recherche d’exotisme, qui se doivent de poser des questions et qui
veulent entendre les réponses qu’ils souhaitent, sans trop les bousculer. Ces derniers
se cachent aussi bien dans la famille que dans les amis ou les collègues.
Tellement heureux de revoir les « aventuriers », et se sentant bête à
parler de leur quotidien, ils posent toutes sortes de questions prévisibles. Et
chacun y va de son « c’était bien ? », « tu dois être mieux ici,
non ? », « est-ce que tu as eu peur? », « la pauvreté
ne t’a pas trop choqué ? »…Mais le pire reste à venir. Voilà le tour
des « préférés ». Même en tant que voyageur, il est dur de s’y
soustraire. Qu’il s’agisse des pays, des souvenirs, des paysages, des gens, il
faut toujours extraire de sa mémoire le superlatif. « C’était quoi la
chose la plus horrible que tu aie mangée ? ». La mission est bien sûr
impossible. Et comment ne pas se lasser très vite de ces questions, auxquelles
on finit par répondre machinalement? Et puis vient le moment critique où le tri
des souvenirs se calque sur toutes ces réponses pré mâchées.
Ceux qui ont bien cerné notre état
d‘esprit, on les compte souvent sur les doigts d’une main. Ou des deux. Pas
plus. Par les lettres, le blog ou le téléphone, ils ont suivi pas à pas
l’aventure. Ceux-là aiguisent les souvenirs. Ils posent des questions-joyaux,
des interrogations brillantes, et font brûler à nouveau la passion du voyage.
Sans trop en faire, ils évoquent une photo qui les a marqués, demandent des
nouvelles des rencontres au fil de la route, ou combien de clous ont crevés les
roue du vieux camion Tata entre Katmandu et Varanasi...
Et puis surtout, comme
si on ne s’était jamais quittés, on reprend les discutions interrompues lors du
départ. Ils parlent de la vie, de leur vie. Et cela pousse à atterrir, à les
questionner sur leurs choix professionnels, sur leur dernière virée ou leur
prochain godet entre potes. Les synapses se reconnectent, on se sent mieux.
Se réadapter au quotidien
Fini les interrogations sur le voyage,
place aux soucis de notre bas-monde : retraite, travail, sécurité sociale,
cotisation, assurance maladie, impôts…Certains semblent inquiets quant à notre
réadaptation à la société occidentale. Aucune raison de paniquer! Pendant des
mois, notre mode de vie s’est calqué sur celui des pays traversés, pourquoi ne
pas réussir à nouveau ? Le décalage de mode de vie est provoqué par un
changement brusque, un catapultage rapide, dû à l’avion, par exemple.
L’avantage que nous avons eu a été notre lenteur. Un luxe. Nous avons voyagé au
rythme des gens, par des modes de transports terrestres. Nous n’avons pas subit
de choc de civilisation, mais avons suivi les mutations culturelles et linguistiques.
Depuis l’Inde, en traversant le Pakistan, on quitte la foule agglutinante. En
Iran, on redécouvre les routes. La Turquie nous informe des dernières tendances
de la mode. L’euro arrive avec la Grèce. L’Italie sonne le retour à la
gastronomie. Et la France est là! Se reconnecter au quotidien du monde réel
n’est pas la difficulté d’un retour de voyage.
Le défi qui nous attend est tout autre.
Après tant de découvertes et de rencontres, comment ne pas changer? C’est
indéniable, un long voyage, ça chamboule ! L’aventure fait évoluer notre
façon de penser. La route nous donne des clés pour changer de mode de vie. Que
faire lorsque l’on revient à notre existence pré-voyage? Mettre toutes ces
idées de côté et rentrer à nouveau dans le moule? Une question de facilité,
mais pourtant, les cheminements personnels ressentis en voyage
« titillent » l’esprit. Pourquoi ne pas agrandir un peu ce
« moule », en prenant soin de ne pas se déconnecter du monde réel?
Vivre sa passion ou vivre de sa passion. Certains vont se poser la question.
Quelle orientation donner à la vie? Reprendre le même travail, ou changer de
voie, puisqu’on se rend compte en voyageant que finalement, beaucoup de choses
sont possibles. Cette étape de questionnement va transporter les uns vers des réflexes
que d’autres ne vont pas comprendre. Ceux qui vont vouloir se « mettre en
danger » en gagnant moins, en prenant plus de temps pour eux et pour les
autres par exemple, vont susciter l’incompréhension, et seront souvent jugé
comme des fainéants. Le défi est alors de trouver un équilibre entre ceux qui
comprennent cette nouvelle logique et ceux qui la rejettent, pour l‘instant. Il
s’agit de la même recherche de connivence et de lien fort entre deux compagnons
de voyage, ou au sein d’un couple, dont les protagonistes ont réagit
différemment au retour. Il faut parfois laisser du temps pour regarder à
nouveau dans la même direction, vers un nouveau projet.
Valoriser notre voyage au long cours
Une règle simple guide nos recherches: ce sera Grenoble ou Lyon!
Comme une idée fixe, ce choix géographique nous a pris un jour, sans prévenir. Être proche des montagnes et de la Drôme. Armelle passe ses entretiens avec verve.
Elle enchaîne les RDV et tire toujours son épingle du jeu. C'est une
championne! Souvent, la question du voyage revient. Une entrevue avec un recruteur tournera
d'ailleurs pendant plus d'une demi-heure autour de notre projet Instinct
Nomade! C'est un « plus » dans son CV, un élément qu'il lui est
facile à mettre en avant. Les DRH apprécient cette ouverture d'esprit, ce goût
de l'aventure et de la débrouillardise, ce courage de partir aussi. Un d'entre
eux ira même jusqu'à dire qu'il aurait rêvé de faire ça lui aussi! Voilà, on y
est. Il faut faire rêver les gens, leur montrer que nous sommes allés jusqu'au
bout de notre rêve. Mais que notre but est aujourd'hui de s'installer, une
façon d'écarter ainsi la question qui trotte dans leurs têtes: « Alors
vous allez repartir, non?! ». Un risque pour eux. Armelle écarte vite le
secteur de l'immobilier, dans lequel elle ne se sent pas bien, et finit par
dire « oui » à une petite boite qui s’avèrera bien sympathique! Elle
arrive même à leur dire qu'en fonction de ses engagements précédents, elle ne
pourra commencer qu'en septembre! Le deal est accepté!
Armelle nous assure donc des revenus pour
la rentrée 2008, à Lyon, ce qui la réconforte. Vidian suspend ses maigres
recherches de job, et se concentre sur les rapports et autres pièces à fournir
au retour pour nos chers partenaires financiers. On dilapide nos deniers restant dans un voyage en Italie avec les potos, pour un mariage toscan, et on
débarque le 1er septembre 2008 à Lyon, ancienne capitale de la soie et haut
lieu de la tripaille, entre Rhône et Saône.
Armelle bosse et s'applique à devenir très
vite autonome en tant que chef de projet en réaménagement de bureau. On appelle
ça de la maitrise d'œuvre, mais aussi de l'assistance à maitrise d'ouvrage. La
boite est jeune, la moyenne d'âge ne s'élevant pas au dessus de 27 ans...
Vidi termine les rapports de fin de voyage
et intervient dans quelques antennes jeunes à Paris (MJC). A travers une petite
exposition photos et en discutant avec les jeunes, il leur montre qu'il est
possible d'aller au bout de ses rêves, et qu'un projet bien construit peu
aboutir sur une belle expérience.
Avec Armelle, ils présenteront aussi leur
voyage dans des écoles primaires. Et là, nous réalisons à quel point les
enfants enregistrent ce qu'ils entendent et/ou regardent à la télé. Les enfants
de la classe de la petite sœur d'Armelle, Marguerite, qui ont étudié un peu la
Mongolie, nous scotchent par leurs connaissances sur le pays, le nom des fêtes
nationales, les us et coutumes...
Un beau chantier
Nous débarquons la veille de la rentrée
des classes d'Armelle. La famille nous loge. Un grand Merci à Olivier et Paule
pour leur gentillesse. Le cousin Clem et Vidian se soutiennent mutuellement
dans leur recherche de job. Trouver un appartement est la priorité. En trois
jours, l'affaire est pliée. Vidian a tout bonnement pris le premier! Mais non
content de payer un loyer peu cher, il a négocié avec le propriétaire de faire
quelques travaux sur les murs en échange de mois de loyer. C'est ainsi qu'un
beau chantier se lance, sous les conseils des artistes Isabelle et Paule, et
grâce à l'aide de tout ceux qui viendront donner un coup de pinceau.
Le 18 septembre, nous emménageons dans notre bel appartement, qui est tout de même plus grand que notre tente de voyage, et où la condensation est moindre!! Ce sera l'occasion pour nous d'un p'tit diner tranquille sur ce qui nous servira de table au début...la table à repasser!!
Alors
qu'Armelle travaille consciencieusement, Vidian fait l'homme de maison, cuisinant
pour sa petite femme, faisant les courses, le ménage, les derniers
aménagements. Ceux de l'ancienne génération lui demanderont souvent si Armelle
fait bien la cuisine, si ce n'est pas trop fatiguant pour elle de s'occuper de
la maison et de travailler... Ce à quoi Vidian répondra en bouffant de rire que
c'est lui l'homme de maison et qu'ils ont décidé avec Armelle de vivre ainsi,
et que c'est lui qui élèvera les enfants! « Mais non, je vais trouver un
vrai travail, et j'enverrai trimer Armelle derrière les fourneaux à charbon, et
faire les poussières dans toute la maison!! ». Cette confrontation des
différents modes de vie nous a beaucoup fait rire.
Perdre les bonnes habitudes ?
Posé sur la selle en cuir de son solex,
cheveux au vent et poignée en coin, Vidi file au rythme d’une vache au galop.
Une côte lui rappelle qu’il faut se servir des jambes sur un vélo-moteur. Il
tire, il pousse, le moteur ralenti mais se maintient au plus bas. Au col, il
laisse échapper un cri en forme de « Kiki Soso Largyalo », comme au
Ladakh, pour remercier les dieux. Il n'est pourtant pas à 5200m mais en haut
d’une colline bretonne. Les bras en l’air, le souffle court, il ne ressemble à
rien le pauvre Vidi. Même la vache qui le regarde en mâchouillant semble avoir
la lueur d’intelligence qui lui fait défaut à ce moment-là. Après un long
voyage, il faut parfois tourner la page, et perdre certaines habitudes.
Et les amis rencontrés en voyage?
La technologie est parfois merveilleuse.
Vidian, assis dans un bar une bière à la main, vient de recevoir un mail de
Sonam, une des filles de notre chère famille du Ladakh. Il dit oui à une
nouvelle bière et fait fi de son alerte SNCF. Elle doit être assise dans un cyber-café de Delhi, un tchaï posé sur la
table. Tout proches, et pourtant, des milliers de kilomètres nous séparent.
Cette jeune fille de l’Himalaya passe en année supérieure de médecine !
Garder le contact avec les gens rencontrés est une façon de prolonger le
voyage. Mais aussi une promesse qui se transforme en challenge. Il existe des
moments de partage éphémère mais intense avec des locaux, mais en les quittant,
nous sachions que la page était tournée, pour eux comme pour nous. Au cours du
voyage, nous avons par contre fait l’effort d’envoyer les photos à ceux à qui nous
l’avions promit. On se pose souvent la question après un échange plus long.
« Vais-je un jour les revoir ? ». Certaines personnes sont
inoubliables. Et comme un pressentiment profond, on sera amené à les revoir un
jour, dans 6 mois, 2 ans ou 10. Et lorsque cette deuxième rencontre intervient,
c’est encore plus intense. En attendant, les nouvelles courent sur la toile. Et
la poste fait le reste, avec toute la poésie de l’écriture à la main. Une
lettre vient d’arriver d’une vallée « oubliée » de l’Himalaya, la
Nubra. Les timbres sont barbouillés d’encre. Paldon, professeur de géographie,
nous donne de ses nouvelles dans un anglais approximatif. Nous nous sommes
revus à chaque voyage en terre Ladakhie. Une amitié s’est créée, très forte.
Et les photos alors? Notre vie de
festivalier!
Après plusieurs mois de réflexion vient
l’idée de trier ses photos et d’en garder l’essentiel. Exercice ô combien
difficile! Chaque image renvoie à un souvenir précis, une odeur, un son…Et l’on
sombre à nouveau dans le vague, les yeux au bord du vide.
C'est alors que le festival de montagne de
Fontaine, une petite ville près de Grenoble, nous met le grappin dessus! Nous
acceptons volontiers de présenter un diaporama de photos de 30 minutes environ,
le tout en musique. Commence alors la ronde des images, la torture de la
sélection, le choix de la musique. Et nous voilà en compétition avec deux
autres projets de voyage, l'un au Kirghizstan, l'autre au Kamchatka. La salle
en amphithéâtre rassemble près de 300 spectateurs, et l'on se demande alors si
notre diaporama réalisé avec Imovie un petit logiciel de base sur Mac, ne va pas
paraître ridicule! Le stress commence à monter lorsque les lumières
s'éteignent. Entre chaque projection, quelques questions sont posées aux
protagonistes du film. C'est avec la voix chevrotante et éblouie par la lumière
blanche des spots que nous répondons comme nous pouvons aux questions, sans
langue de bois et surtout sans se prendre la tête. « Oui, nous avons fait
ce voyage pour nous, sans aucun but humanitaire ni écologique, juste pour la
recherche de l'aventure et de nouvelles rencontres. Oui, on en a bavé parfois.
Non, nous n'avions pas de caméra. Et non, dans notre diaporama, nous avons
préféré mettre davantage de musique moderne que de chants tibétains » (le
présentateur avait aussi des questions inintéressantes)! Le jury trié au hasard
dans le public arrive alors en scène et déclare le gagnant du festival:
Instinct Nomade. Avec une boule au fond de l'estomac, mais un sourire à se
décrocher les oreilles, on débarque sur la scène où l'on nous remet un beau
chèque à dépenser dans un magasin de montagne, EXPE. Wouah!
2h du matin, Vidian se bat avec le
logiciel de montage Adobe Première (version anglaise!) pour créer quelques
effets dans la succession des images que l'on prépare pour le festival
d'Autrans. Pour les bourses Expé, nous devons construire un diaporama de 9
minutes qui sera présenté lors de la soirée des « Bobines de
l'extrême ». A la clé, près de 2000€ de bons d'achats chez Expé. 4H du
matin, Vidi commence à régler le son, à gérer les transitions, le niveau
sonore... Nous serons 8 équipes en lice pour ce festival international du film
de montagne. Mais nous concourrons dans le festival Off, celui que personne ne
regarde (ou presque). Nous, on est tellement heureux d'aller à cet événement,
et puis on fait ça pour nous, pour être fier de présenter quelque chose de
beau. 6H45, Le réveil sonne. Armelle passe la tête au dessus de la balustrade
de la mezzanine et aperçoit Vidian, le casque sur la tête, dodelinant, la tasse
de thé fumante, qui termine les derniers réglages. Il traine des valises sous
les yeux, mais il sourit, il a l'air content de son coup. Un générique de
début, un remerciement final et notre petit montage est prêt. Au terme d'une
soirée où les films furent très différents, passant de la spéléologie à
l'alpinisme, en passant par la marche à pied, le jury, tiré au sort dans le
public, nous élit les (très) heureux gagnants!! Notre bande-son punchy et la
qualité des photos ont semble-t-il fait penché largement la balance de notre
côté. A la sortie de la projection, on nous regarde attentivement en nous
disant bravo! On se sent tout timide. Touché par « l'émotion qui se dégage
des photos » (ah bon?!), un illustrateur viendra même nous offrir un de
ses bookins! Nous profitons d'être logé sur place pour se régaler des projections
de film de montagne, et pour observer ce petit monde de l'aventure et des pics
enneigés qui gravitent autour des salles de projection. Dans les couloirs, et
surtout devant le stand de dégustation
de « Chartreuse », ça discute de voyages, de projets de tournage, d'articles
et de reportages... Fascinant!
La vie à Lyon
Armelle se
sent de mieux en mieux dans sa petite agence, et Vidian cherche dans
différentes directions: urbanisme, organisation de séminaire et espace naturel.
Le premier secteur ne le passionne guère, le second est un peu restreint par la crise, et le dernier est trusté par des copinages
douteux. Alors il réactive son réseau et anime quelques séminaires pour son
ancienne boite basée en Camargue (Group Magellan), tout en rédigeant divers
articles sur le voyage, notamment pour Trek Magazine. Il finit par répondre à
une mission de Group Magellan, en créant sa propre boite! Et le voilà entrepreneur, fier de gérer son temps et de gagner sa vie. Il développe aujourd'hui sa structure selon trois axes que sont l'événementiel, la logistique et la communication, et enchaine les RDV commerciaux. Allez donc jeter un oeil sur www.aveho.fr.
Mais le plus
important, c'est notre capacité à nous évader chaque we. Nous nous mettons
rapidement au ski de randonnée. Le principe est simple. Prenez des skis de
piste plus léger et des fixations particulières, collez une peau de phoque
pêchée dans le Rhône et grimpez en haut de la montagne. La suite est belle.
Retirez avec grâce la peau et glissez dans la puff, pour curver comme un ouf en
passant des backflips de guedin en attéro arrière on the nose! Bon, pour les
néophytes comme nous, et surtout pour Vidian qui n'avait jamais fait de ski
(seulement du snowboard), les premières descentes ont été laborieuses. Mais
quel pied d'être quasiment seul en montagne, et libre de faire sa trace!!
jhkj
Nous passons du temps dans le Vercors, dans de petites stations pour se perfectionner et pour donner un coup de main à Julien le musher des landes, notre pote conducteur de chien de traineaux installé à Autrans pour la saison. Un territoire sauvage et magnifique pour le traineaux! Sa caravane nous servira de pied à terre de luxe en pleine montagne. Merci garçon!!
fgg
L'appart'
devient vite un lieu de passage pour tous les amis, de France et de Navarre. On
accueille ceux qui cherchent du boulot dans la région, les Espagnols ou Hongrois
venus en we découvrir la ville et la montagne, ceux qui partent bosser pour une
mission dans le sud, et tous ceux qui savent que l'apéro est offert lorsque
l'on frappe à la porte!! Notre voisine surnomme même notre appartement
« l'auberge espagnole »!
Nous gardons en fait les yeux ouverts, pour les paysages et les
rencontres improbables, tentons de briser dès que possible la routine qui
s'installe, prenons des risques pour brusquer notre vie, prenons le parti de
vivre au grand air dès que possible, en nous échappant en montagne, prenons
plaisir à connaître mieux les petits commerçants du coin, et en nous laissant envouter
par le charme du quartier, où tout les vieux d'Afrique du Nord viennent taper
la discute un thé à la main sur la place Gabriel Péri, nostalgie de la vie au bled...
Ce que le
voyage nous a appris
Instinct Nomade a aiguisé notre capacité à nous adapter. Dans le cadre professionnel, où l'on est confronté à des éléments inconnus, nous arrivons à mieux rebondir, à garder suffisamment de recul pour s'auto-évaluer et ne pas se monter le bourricot pour rien. Nous rencontrons des gens bien différents, autant au boulot que dans la sphère privée de notre vie quotidienne et nous prenons plaisir à se sentir proche de tout le monde. Notre métier ne doit pas être qu'une contrainte, mais un lieu où l'on continue d'apprendre, où l'on peut grandir ou faire grandir une qualité. Et il n'est pas toujours facile de garder ce regard!
Le voyage, de
par les rencontres étonnantes et les parcours de vie de ces personnes, nous a
appris que rien n'est vraiment impossible dans la vie. Il nous semble important
de regarder autour de soi et saisir des opportunités en restant fidèle à ses
valeurs.
Notre périple
nous a fait comprendre à quel point les relations humaines sont primordiales,
et qu'il faut prendre du temps pour les amis, la famille, pour soi aussi. Il
n'est pas toujours facile de respecter ce type d'engagement, mais lorsqu'un
stress arrive, nous prenons sur nous en disant « stop »! On se cale alors dans un fauteuil, un potos au bout du fil...
Et puis ce
grand périple nous a permis de mieux nous connaître et d’apprendre à toujours
plus nous aimer, même dans les difficultés. Nous nous sommes tenus la main
pendant des milliers de kilomètres et avons traversé bien des épreuves, nous ne
pouvons en ressortir que plus fort, et plus confiant dans la vie. Aujourd’hui,
nous brisons la routine dès que possible par de petits gestes, et sans télé ni
tabou, nous vivons notre petit bout de vie, d’amour et d’eau fraîche (ou
gelée !) avec simplicité. C'est pas "cul-cul", c'est juste de l'heureusitude!
L’aventure
« bloguesque » d’Instinct Nomade se termine ici, avec vous. Nous vous
remercions encore du fond du cœur pour tous vos commentaires et impressions que
vous nous avez témoigné, et que nous
attendions avec tant d’impatience au fond de notre cyber café du bout du monde.
Un grand merci à tous ceux qui nous ont soutenus dans cette belle aventure, et
à tous les inconnus qui nous ont écrit, de France et de Navarre.
La vie continue maintenant, alors haut les cœurs !
Special thanks to our friend Valdas, from Lithuania